Le suicide est par définition l’acte consistant à se donner délibérément la mort, Freud l’évoquait comme étant « le retournement contre soi d’une impulsion meurtrière contre autrui ». Il est à la fois perçu comme un symptôme et un échec. En effet, la tentative de suicide n’est pas en soi une maladie mais un symptôme démontrant un trouble de l’adaptation de la personne à son environnement. Il représente également un échec de la vigilance collective et de la société à prévenir cet acte. Le suicide, au-delà d’un acte individuel, marque donc un échec collectif de la société envers le suicidant. Il faut sortir de l’individualisme selon lequel chacun est maitre de son destin et donner une réponse collective et concertée pour éviter l’irréparable.

Le taux de mortalité par suicide en Europe est de 11,3 pour 100 000 habitants, en France il est de 13,4. 9 000 personnes se suicident chaque année en France ce qui représente 25 morts chaque jour pour 685 tentatives. Les études montrent que le plus grand nombre de suicides concerne les hommes. Il y a en effet trois fois plus d’hommes morts par suicide que de femmes. Ce sont cependant les femmes qui font le plus de tentatives de suicide. Enfin, on dénombre le plus de suicides chez les personnes se situant dans la tranche d’âge 45-54 ans.

La prévention concerne tous les efforts collectifs d’organisation, de professionnels de santé ou autres pour réduire l’incidence du suicide. Il est possible de prévenir le suicide et c’est justement l’objet de cette journée nationale de prévention du suicide qui se déroule tous les ans le 5 février. Elle permet la mise en réseaux de professionnels organisant des colloques afin de réfléchir à des stratégies de prévention et de fixer des objectifs pour garantir une réduction de l’incidence du suicide. Parmi les objectifs, nous retrouvons la promotion de milieux de vie favorables à la santé mentale, le renforcement des facteurs de protection individuelle, la sécurisation des environnements (humains et matériels). Pour réussir cela, il faut avoir les moyens pour maintenir le contact avec les personnes suicidaires ou ayant fait une tentative de suicide, former au repérage et à l’orientation de la crise suicidaire et soutenir les approches de prévention citoyenne et associative.

La santé mentale est l’une des cinq priorités nationales de santé comme réaffirmée dans la loi de modernisation de notre système de santé du 26 janvier 2016 et la prévention du suicide en fait partie. La réponse en France pour lutter contre cette affliction a été faite par la création d’instances chargées spécialement de travailler sur des techniques et approches visant à réduire le taux de suicide ainsi que la mise en place d’un numéro vert permettant le contact direct avec les personnes concernées.

 

Création d’instances spécialisées

Deux grandes organisations nationales agissent pour atteindre les objectifs précédemment cités : l’Union Nationale pour la Prévention du Suicide (UNPS) et le Groupement d’Étude et de Prévention du Suicide (GEPS). De plus, le Ministère de la Santé et de la Prévention a installé le Conseil National de Santé Mentale le 10 octobre 2016.

 

L’UNPS est une association trouvant son origine en 1996 lorsque sept représentants d’associations, agissant sur le terrain de la prévention au suicide, décident d’organiser et de promouvoir une Journée Nationale pour la Prévention du Suicide. C’est en 2001 que l’une des sept associations deviendra l’Union Nationale pour la Prévention du Suicide qui coordonne encore aujourd’hui la Journée Nationale pour la Prévention du Suicide.

Aujourd’hui, l’association regroupe une quarantaine d’acteurs nationaux de la prévention du suicide pour accompagner le travail préparatoire des politiques dans la mise en place de lignes stratégiques relatives à la prévention du suicide. Dernièrement, en décembre 2022, l’association a rejoint le comité de pilotage de la Stratégie Nationale de Prévention du Suicide du ministère de la Santé et de la Prévention.

Les adhérents à l’UNPS, professionnels, bénévoles ou personnes morales, agissent pour accueillir, écouter ou accompagner les personnes susceptibles de s’ôter la vie, mais aussi les personnes ayant subi le suicide d’un proche. D’après la charte de l’UNPS, les adhérents ont pour mission de sensibiliser l’opinion publique à la possibilité d’une prévention au suicide, de conduire une réflexion sur l’acte suicidaire et sur l’accompagnement des suicidaires avec tous les acteurs concernés, notamment les professionnels de santé. Ils doivent également coopérer avec les responsables de toutes les collectivités accueillant jeunes, adultes et personnes âgées, notamment les acteurs des champs éducatifs et sanitaires, afin de mieux repérer les causes qui conduisent à la tentation du suicide, et à trouver les moyens de les enrayer. Enfin, ils ont pour rôle de proposer leurs concours à toutes les institutions souhaitant participer à la prévention du suicide.

 

Pour la 27e Journée Nationale pour la Prévention du Suicide, l’UNPS souhaite s’interroger sur les dispositifs qui permettent de mieux prévenir et de mieux accompagner. Selon l’association, les démarches proposées doivent répondre à au moins quatre caractéristiques pour être efficaces :

– identifier au plus près les problèmes à traiter,

– concevoir ou adapter les dispositifs et outils pertinents pour intervenir,

– diffuser leurs caractéristiques pour que leurs usages soient inspirants et non contraignants dans leur implantation,

– accompagner une évolution parallèle des représentations et des croyances pour faciliter l’appropriation de ces dispositifs et outils.

 

En plus de proposer une réflexion sur cette question de modification des dispositifs, l’UNPS organisera diverses manifestations sur tous les territoires métropolitains et outre-Atlantique afin de sensibiliser à la cause.

Mise en place d’un numéro national de prévention du suicide

Le numéro national de prévention du suicide est le 3114. Officiellement lancé le 1er octobre 2021 par le Ministère de la Santé et de la prévention, il constitue une réponse personnalisée dans la problématique du maintien du lien avec le système de santé pour les personnes en souffrance. Gratuit et accessible 24h/24 et 7j/7 sur tout le territoire, il effectue une prise en charge de la personne ayant des idées suicidaires comme de l’entourage de ces personnes.

Afin d’en garantir l’efficacité, ce service est assuré par des professionnels de santé, infirmiers ou psychologues qui ont été spécialement formés à la prévention du suicide.

Ce numéro permet aussi une formation des professionnels de santé car il est également à disposition des soignants souhaitant en apprendre davantage sur la prévention du suicide.

Olivier Véran, ancien ministre de la Santé, a d’ailleurs reconnu son efficacité le 6 janvier 2023, en comparant les numéros verts qui marchent et ceux qui ne marchent pas. Selon lui, le 3114 reçoit « des milliers d’appels tous les jours » et « sauve des vies ». On sort ainsi de l’individualisme en proposant une solution à portée de main à toute heure et qui fonctionne.

 

Stanislas BODA

Master 2 – Comparative Health Law

Université Paris Cité